|
|
Bitter sweet memories [Christian] |
|
|
Auteur |
Message |
Mr. H.
Identité Âge: 28 ans Relations:
|
Sujet: Bitter sweet memories [Christian] Mer 20 Mai - 23:06 |
|
|
Depuis plusieurs semaines, il l’évitait. Mr. H. n’avait jamais vraiment considéré ses aventures répétées comme des histoires sérieuses. Oh, il n’avait jamais été un profiteur – quoique – et pensait même avoir été plutôt reconnaissant de ces moment de plaisir qu’on avait bien voulu lui offrir. Si sa mémoire défaillait bien souvent, il avait la sensation d’être bien différent de celui qu’il était auparavant, et pourtant il n’avait pas changé. Alors, non, il n’avait jamais considéré ses aventures comme une façon de tromper Gerald. Mais tout avait changé. Avec Ian, c’était différent. Avec Ian, il n’avait pas seulement trompé Gerald avec son corps, mais aussi avec son cœur. Et cela, c’était tout à fait autre chose. Alors, depuis autant de temps qu’il évitait Ian lui-même, il évitait Christian. Car il avait beau se le répéter mille fois, il ne parvenait pas à se faire à l’idée que Christian n’était pas Gerald. La ressemblance était trop forte. Et certains souvenirs ne voulaient pas disparaître. Christian ressemblait-il vraiment à Gerald ? Il n’aurait su le dire. Il n’était plus sûr de rien, à dire vrai, mais il lui semblait que leurs visages étaient bel et bien identiques. Sinon, pourquoi aurait-il ressenti cette foule d’émotions qui l’assaillaient chaque fois qu’il croisait le jeune homme ? Pourquoi son cœur se serait-il serré chaque fois que leurs regards se croisaient ? Pourquoi se sentait-il si mal lorsque le Gardien l’ignorait ? Ça ne pouvait que Gerald. Mais ça ne pouvait pas être Gerald ! Le jeune homme était mort depuis bien longtemps... Était-ce alors son spectre qui revenait le hanter pour le faire souffrir, pour lui faire revivre jour après jour ce qu’il s’était passé ? Cela avait-il encore la moindre importance ? Tout semblait avoir changé depuis... ce jour-là. Depuis qu’il s’était aperçu qu’après huit années, ses sentiments pour Ian n’étaient plus du tout les mêmes qu’auparavant. Il n’oserait plus jamais regarder Christian. S’il était bel et bien un fantôme, peut-être n’aurait-il aucun mal à lire dans ses yeux ce qu’il avait fait, de quelle façon son cœur s’était détourné de lui pour un autre. En définitive, Mr. H. souffrait de cette situation. Pour cette raison, il faisait son possible pour éviter Christian, alors qu’auparavant il aurait donné n’importe quoi pour se trouver sur son chemin. Le destin était cependant bien capricieux, et joueur. C’était bien souvent lorsqu’on évitait absolument quelque chose que cela arrivait, et bien sûr Mr. H. n’y échappa nullement. Curieusement, le destin semblait prendre un malin plaisir à s’acharner sur lui... Il avait décidé de continuer ses recherches. Son passé le fuyait, et même s’il se rendait compte que le présent avait un charme indéniable, il ne pouvait se résoudre à abandonner totalement l’idée de se souvenir. Comme bien souvent dans ses moments de libre, il s’était donc rendu dans l’aile abandonnée pour fouiller parmi les décombres de la salle de bal. Dans ses cauchemars, ceux qui l’empêchaient toutes les nuits de trouver le sommeil, Mr. H. voyait cette salle, remplie de monde, des personnes bien vivantes qui prenaient du plaisir à discuter et à danser. Puis il voyait l’horreur, l’horreur absolue. Et au milieu de cela... Gerald. Gerald et cette femme. Il trembla et secoua la tête pour chasser les images cauchemardesques qui lui venaient à l’esprit. Il n’avait même pas encore passé le seuil de la salle qu’il revoyait déjà les sombres horreurs qu’il croyait avoir vécues. Mais alors qu’il franchissait ce seuil, il s’interrompit, comme frappé d’une flèche invisible qui le stoppa net au milieu de son avancée. Il aurait reconnu la silhouette tant aimée entre mille. Cette stature, ce port fier, ces longs cheveux bruns... Il avait toujours voulu glisser ses doigts dans ces cheveux-là. On le lui avait toujours refusé. Comme à chaque fois, son cœur se serra. Les sentiments se bousculèrent, sa respiration s’accéléra. Culpabilité et désir le submergèrent. Puis un autre sentiment. Le sentiment de ne plus vraiment appartenir à cet homme qui, de toute façon, n’avait jamais, au moins en apparence, été à lui.
– Mr. Valentine...
Comme à chaque fois, il avait failli prononcer le prénom tant aimé et s’était rattrapé au dernier moment. Il voulait voir son visage. Contempler de nouveau ces yeux. Peut-être alors saurait-il s’il avait encore les mêmes sentiments à son égard. Durant toutes ces années, il ne s’était pas posé la question : il aimait Gerald. L’arrivée de Christian, avec sa ressemblance frappante, parfait sosie, parfait spectre issu des ténèbres de son passé, n’avait fait que conforter ses sentiments jamais éteints. Mais il y avait Ian, à présent. Et tout semblait s’être compliqué.
– Seriez-vous ici pour vous souvenir du passé, vous aussi ?
Il n’ajouta pas le « Retournez-vous » désespéré qui lui montait aux lèvres. Il voulait voir son visage... Sa question avait été une façon de lui demander s’il reconnaissait cet endroit. Christian ne parlait jamais de lui. Mr. H. ne savait même pas d’où il venait. Il était juste là, et il faisait son travail, avec talent. Mais toujours, toujours, il conservait une distance froide et respectueuse à l’égard de son employeur, qui aurait donné n’importe quoi pour un peu plus d’attention. Alors, comme toujours, Mr. H. cherchait à en savoir plus. Cherchait à savoir s’il y avait un lien entre cet homme énigmatique et le cousin tant chéri. À savoir s’il l’aimait toujours autant qu’avant. Car il y avait Ian, et tout s’était compliqué.
|
|
|
|
Invité
|
Sujet: Re: Bitter sweet memories [Christian] Ven 22 Mai - 23:25 |
|
|
Cela faisait maintenant un peu plus d'un an depuis que Christian Valentine avait mis les pieds à High Creek. Il s'était présenté avec un pedigree impeccable, une assurance certaine et un charisme pouvant passer du chaud au froid en un battement de paupières. Le dos éternellement droit, l'allure presque princière, le port de tête fier, Christian ne laissait guère indifférent. Parmi les Gardiens, il était celui qui n'avait jamais outrepassé ses droits sur les prisonniers. Aussi intègre que rectiligne, il avait toujours fait preuve d'une objectivité effrayante. Aucune larme ne pouvait attendrir son coeur, aucune supplication ou prière ne le faisait fléchir. Glacial et constant, Mr Valentine avait rapidement eu le sobriquet d'automate ou de robot. Elles étaient bien rares les occasions où un sourire éclarait son visage. Christian appliquait scrupuleusement le règlement avec une expression détachée, presque blasée et dénuée de toute humanité. En une année, il avait eu largement le temps de prendre ses marques. Christian s'adaptait à n'importe quelle situation. Crises, colères, poussées de violence ou catatonie, aucun détenu n'était parvenu à la déstabiliser ou à le mettre à mal. A force d'observer scrupuleusement les personnes dont il avait la charge, il avait aisément pris connaissance des moindres recoins du château. Instinctivement, il en avait même (re)découvert d'autres. Ainsi cette minuscule coursive derrière telle tenture. La fine couche de poussière qui en jonchait le sol lui indiquait que l'endroit n'avait pas été foulé depuis des années. Il s'était même surpris à laisser divaguer son regard sur d'antiques gravures faites d'une main maladroite sur un mur quelconque. Contrairement aux apparences, il n'était pas à l'aise dans le parc et évitait toujours de s'y retrouver seul. Parfois, il avait l'impression de distinguer deux fines silhouettes qui s'enfuyaient dans les fourrés, il entendaient leus rires cristallins qui résonnaient singulièrement à ses oreilles. Il avait alors l'impression désagréable d'être très proche de quelques chose sans pouvoir la nommer ou la décrire. Des images inconnus affleuraient à la surface de sa mémoire sans jamais en émerger. Il secouait alors la tête reprenant sa routine sans jamais parler de ces étranges spectres venus d'une autre époque qui semblaient parcourir le château.
Si le parc le mettait mal à l'aise, que dire de l'aile abandonnée...les salles vides qui portaient encore les stigmates d'une ancienne catastrophe le terrorisaient littéralement. Il aurait été bien incapable d'en expliquer les raisons, mais dès qu'il s'approchait de ces pièces désertes, inhabitées, une angoisse lui étreignait le coeur. Il pouvait sentir ses doigts froids resserrer leur pression sur sa poitrine, lui coupant presque le souffle. Nuls rires dans ces parties de High Creek ne résonnaient. Le vent mugissait de façon lugubre dans les fenêtres aveugles, il faisait voleter les rideaux à demi consummés comme si quelqu'un d'intangible passaot juste derrière. Parfois, certaines nuits, Christian se réveillait pantelant, ses longs cheveux collés contre son dos, un cri muet sur les lèvres. L'image d'une salle de bal en proie aux flammes imprimées sur ses rétines. Une odeur de roussi, de cheveux brûlés et de chair carbonisée emplissait fugitivement ses narines. La salle de bal, son centre presque épargné par les flammes et couvert d'une substance peu ragoûtante et inconnue le faisait s'égarer dans des souvenirs anciens qu'il avait l'impression de connaître sans pour autant se rappeler d'avoir vécus.
__________
La petite horloge suisse de sa chambre égrenait inlassablement les secondes de son tic tac lent et régulier. Une lune ronde et argentée dardait ses rayons blâfards à travers les voilages fins des fenêtres. Christian Valentine s'était endormi, assis dans un fauteuil à haut dossier, un livre entre les mains. Derrière ses paupières closes, ses yeux s'agitaient. Des voix familières s'élevaient autour de lui. L'obscurité dans laquelle il était plongé s'effaçait au profit de meubles laqués et vernis. Il se trouvait dans cette même chambre, une jeune femme au bras. Avec étonnement, il s'entendit expliquer à l'inconnue que c'était ici qu'il dormait lorsqu'il venait. Inconscient, Christian se leva de son fauteuil. Le livre glissa lentement de ses mains pour tomber sur l'épais tapis qui couvrait le plancher. Il quitta sa chambre d'un pas mécanique, les yeux clos. Dans les couloirs habituellement déserts et plongés dans la pénombre, il croisa une foule de gens pépiants et souriants. Il essayait de retenir le moindre détail mais la jeune femme l'entraînait fermement en riant. Elle lui parlait d'un "ami" qui était rentré d'un long voyage. Christian quitta l'aile réservée aux gardiens et s'aventura à l'extérieur. La fraîcheur de la nuit ne le fit pas frissonner. Toujours plongé dans un profond sommeil, il continuait à suivre la jeune femme pendue à son bras dans le monde onirique. Avec l'assurance d'un grand habitué de l'endroit, il pénétra dans l'aile abandonnée, se dirigeant résoluement vers la salle de bal carbonisée. Dans son rêve, l'effervescence des convives était presque palpable. Un homme se fraya un chemin à travers ses invités...mais comment Valentine pouvait-il savoir que les lieux appartenaient à ce dernier? Avant qu'il eût le temps de réagir, l'inconnu à l'allure fière s'arrêta devant lui. Une silhouette était derrière lui. Avec une lenteur digne de la pire torture, le visage caché dans l'ombre de l'imposant personnage sortit des ténèbres. Un nez fin et droit. Des lèvres pleines. Un regard presqu'ambré. Mon Dieu...il le connaissait...c'était...
Mr H. - Mr. Valentine... La voix du directeur d'High Creek le tira brutalement de son rêve. Clignant des paupières, tournant le dos à Mr H., Christian se rendit rapidement compte de où il se trouvait. Sa respiration s'accéléra. Comment était-il arrivé ainsi? Le coeur battant, il reprit pied avec la réalité. Il avait froid. Et il était pétrifié de peur. Seriez-vous ici pour vous souvenir du passé, vous aussi ? La voix de Mr H. s'éleva de nouveau.
Lentement, Christian pivota pour faire face à son supérieur. Il avait fait le serment à quelqu'un d'important que sa mémoire avait oubliée de servir fidèlement cet endroit. Et uniquement le servir. Un pacte bien spécial, au prix onéreux et aux clauses complexes gravées à l'état d'instinct dans son subconscient. Son regard émeraude plongea dans celui de Mr H. Il battit des cils et à chaque fois que sa vue se masquait le visage du jeune homme caché derrière l'ancien propriétaire d'High Creek lui apparaissait futivement. Les sourcils froncés, les paupières plissées, ses lèvres s'arrondirent et en silence, il murmura pour lui même.
Valentine - Je le connais... Un frisson parcourut ses épaules. Son visage qui portait jusqu'alors une expression entre la surprise et l'effroi retrouva peu à peu son masque d'indifférence. Tout en se frottant les bras pour se réchauffer, il fit quelques pas vers Mr H., évitant avec naturel le centre de la pièce. Veuillez excuser cette intrusion nocturne, Monsieur. Je n'ai jamais souffert de somnambulisme mais il semble qu'il y ai un début à tout.
|
|
|
|
Mr. H.
Identité Âge: 28 ans Relations:
|
Sujet: Re: Bitter sweet memories [Christian] Sam 23 Mai - 14:29 |
|
|
Toujours la même distance, toujours la même politesse froide et lisse. Mr. H. sentit son cœur se serrer. Si Christian ressemblait trait pour trait à l’homme qu’il avait jadis aimé, sa personnalité était bien différente. Autrefois, ils auraient joué ensemble, ils auraient ri. Iris aurait tenté une approche vers Gerald ; le jeune homme l’aurait doucement repoussé. De cela, il ne restait plus rien. Juste des bribes de souvenirs que le temps s’évertuait à lui voler. De ce qu’il s’était passé dans la salle de bal, Mr. H. ignorait tout. Il croyait voir des ombres là où il n’y en avait pas, il croyait entendre des rires là où ne régnait que le silence. Par moment, il trouvait devant ses pas les restes d’un corps calciné, des os tellement noirs qu’on aurait pu les prendre pour des morceaux de bois sec. Et au milieu de tout, une bague que le feu n’avait pu faire fondre, gravée d’un G et d’un N qui lui rappelait désespérément quelque chose. Il avait toujours la chevalière dans la poche, et elle se rappela à son bon souvenir lorsque Christian parla. Mr. H. était convaincu que le jeune homme qui se tenait en face de lui n’avait rien de commun avec celui qu’il avait connu par le passé, mais son cœur, et uniquement lui, battait avec l’espoir que ce pourrait être le même homme. Le dernier souvenir qu’il avait de Gerald était ce visage, ce corps qui se dressaient à présent, bien réel, dans la salle de bal détruite. Avait-il connu la destruction de cet endroit ? Il ne s’en souvenait plus. Il croyait voir des choses, entendre des bruits, mais aucun souvenir tangible ne voulait venir se mettre en place derrière ses paupières closes. Cela faisait trop longtemps. Sa mémoire le fuyait. Comme dans un rêve, il vit Christian se rapprocher ; comme toujours, il détourna le regard un court instant, avant de l’observer à nouveau. Beaucoup de choses avaient changé. Il n’était plus le même que lorsqu’il était adolescent. Il ne riait plus pour un rien, il n’était plus opprimé, il n’était plus soumis aux volontés de son père. Seul son embarras devant Gerald n’avait pas changé.
– On dit qu’il ne faut pas réveiller les somnambules, dit-il lentement. J’aurais pu vous tuer...
Quelque part dans son esprit, une petite voix qui était la sienne ajouta « une deuxième fois », mais il la chassa résolument. L’idée qu’il eut pu provoquer la mort de Gerald était absurde, et pourtant il ne parvenait pas à se défaire de cette pensée. Comment cela aurait-il pu arriver ? S’il avait dû tuer Gerald, il serait probablement mort juste après lui. Sauf qu’il ne pouvait plus mourir. Il avait l’éternité devant lui, l’éternité à se languir de lui... non. Plus à se languir de lui. Il y avait Ian, à présent. Jusqu’à quand ? Jusqu’à ce que le temps, ou quelqu’un, ne le lui prenne ? Jusqu’à ce qu’on ne vienne encore lui ravir ce à quoi il tenait ? À cette pensée, il serra les lèvres. Pas Ian. Rien ni personne ne lui arracherait Ian. Et Christian, dans tout cela ? Où en était ses sentiments à son égard ? Non, pas à son égard, mais à celui de Gerald. Son cousin serait venu le voir depuis longtemps, aurait passé un bras autour de ses épaules pour le rassurer. Lui dire « Tout va bien, ne t’inquiète pas ». Christian, lui, restait froid, distant. Mr. H. n’était plus sûr de rien. Il avait tellement longtemps aimé ce souvenir... à présent, tout était confus. Mr. H. fit quelques pas en avant, parmi les décombres de la salle de bal. L’ancien propriétaire était peut-être mort dans ces lieux, avec le reste de sa maisonnée. Mr. H. n’avait aucune idée du lien qu’il pouvait avoir avec High Creek. C’était trop loin. Il évita un amas de poutres effondrées du plafond en ruines, avant de tourner le regard vers Christian. Dans le passé, il aurait proposé un cache-cache, et Gerald aurait accepté en riant. Ils auraient joué, comme des enfants, sans se soucier de leurs parents, sans se soucier de leurs émotions. Ils auraient joué. Il sourit au Gardien, sans toutefois pouvoir y mettre la même innocence que lorsqu’il était adolescent.
– Comment se passe votre séjour à High Creek ? Nous avons peu souvent eu l’occasion d‘en discuter.
A dire vrai, ils n’avaient jamais réellement pris le temps de discuter. Mr. H. avait bien sûr déjà invité Christian à venir prendre le thé, mais une chape de plomb était tombée sur eux et la conversation avait été pour le moins pesante. En fait, ils n’avaient rien trouvé à se dire, Christian trop distant et Mr. H. trop hésitant.
– J’ai l’impression d’avoir vécu toute ma vie ici, soupira-t-il, presque pour lui-même. N’avez-vous pas cette impression, vous aussi ? Le sentiment de très bien connaître cet endroit... et certaines personnes qui y vivent ?
Il avait posé cette question avec le fol espoir que Christian répondrait oui. Dans ses rêves les plus fous, avant qu’il ne réalise qu’il avait des sentiments pour Ian, il avait imaginé que Christian revenait vers lui, lui disant qu’il n’avait rien oublié, et qu’il était revenu d’entre les morts pour lui, pour l’aimer. Fleur bleue, Mr. H. ? Ce n’était pas pour rien qu’il portait le prénom d’Iris.
|
|
|
|
Invité
|
Sujet: Re: Bitter sweet memories [Christian] Dim 24 Mai - 13:32 |
|
|
Politesse. Courtoisie. Maîtrise de soi. Autant de qualités qui vous faisaient briller dans la haute société bourgeoise anglaise mais qui vous coupaient des autres. On ne laissait tomber le masque qu'en de rares occasions. Ces valeurs, Christian les avait fait siennes naturellement, comme si elles lui avaient toujours appartenues. Pourtant, les souvenirs liées à son enfance, période où on inculquait de façon austère aux enfants nantis ces qualités, étaient flous. Les images qui emplissaient sa mémoire étaient floues, morcelées. Elles ne possédaient pas de lien et surgissaient dans ses rêves, ses moments d'isolement. Christian les subissait, incapable de les relier, seul face à une énigme dont le clé semblait être le directeur de High Creek. Or, il ne lui en avait jamais parlé...à dire vrai, il n'en avait parlé à personne. High Creek était un lieu angoissant, une personne "fragile" pouvait peut-être se laisser envahir par la mélancolie et l'atmosphère presque morbide des lieux pour fantasmer des images oniriques générées par une imaginatio; un peu trop débridée.
Mr. H - On dit qu’il ne faut pas réveiller les somnambules. J’aurais pu vous tuer...Levant ses iris émeraudes et les plongeant dans celles de Mr. H, Christian esquissa un fugace demi-sourire énigmatique. Christian - Cela aurait été une nouvelle rumeur pour High Creek et un fantôme de plus pour peupler les nuits les plus angoissantes de vos pensionnaires.
Une ombre de plus qui se serait glissé dans les couloirs envahis par le silence et la pénombre. Le Gardien somnambule réveillé brusquement. On entendrait ses pas résonner sur les dalles certaines nuits. Silhouette incertaine et vive, ignorant les raisons de sa présence, recommençant inlassablement la même tâche jusquà la fin des temps. Au fil du temps, il en oublierait presque son nom... mais n'était-ce pas ce qu'il était déjà? La première fois qu'il avait vu Mr. H, la première fois que leurs regards se sont croisés, Christian avait eu l'impression que tout était soudain clair. Pendant un moment extrêmement bref, il avait éprouvé joie, certitude, sérénité, comme si une seconde chance se était proposé. Puis l'entretien avait repris et ces sensations avaient disparu aussi qu'elles étaient apparues.
Mr. H - Comment se passe votre séjour à High Creek ? Nous avons peu souvent eu l’occasion d‘en discuter. Valentine s'accordait très peu de temps à consacrer aux relations sociales. Ses rares instants libres, il les passait à lire ou à jetter sur le papier quelques salles d'High Creek qu'il dessinait d'un trait nerveux. Il était une énigme pour les autres Gardiens, et il ne donnait guère envie de se rapprocher de lui. Froid et distant, Christian semblait ne vivre que pour appliquer le règlement. Les prisonniers l'avaient élu le plus Gardien le plus mécanique d'High Creek. Aux paroles de l'autre homme présent dans la salle, Valentine courba légèrement la nuque. Christian - En effet, nous n'avons guère le temps de nous croiser et de nous arrêter pour échanger quelques mots. Mon séjour se passe très bien, je vous remercie de vous en soucier. High Creek est un endroit bien singulier. Il leva son regard vert au plafond léché par les flammes. Un lustre noirci pendait tel un cadavre depuis la voûte. On distinguait encore sur certaines surfaces épargnées par les flammes, des personnages mythologiques en pleine fête. Un Hermès aux pieds ailés entraînait dans sa danse une nymphe aux cheveux feuillus. La croupe d'un cheval cabré dont le corps se perdait dans les stigmates de l'incendie. La tête d'un tigre surgissait d'une autre trace du brasier et Christian imaginait très bien Dionysos jugé sur un char tiré par le félin, une coupe de vin à la main. Un endroit qui se prête à toutes les rêveries et à tous les cauchemars. Mr. H - J’ai l’impression d’avoir vécu toute ma vie ici. N’avez-vous pas cette impression, vous aussi ? Le sentiment de très bien connaître cet endroit... et certaines personnes qui y vivent ? Le Gardien détacha les yeux du plafond pour les reposer sur son interlocuteur. Christian - Non, je n'ai pas cette impression. Mais il arrive parfois que mes pas me guident dans des endroits absolument insoupçonnables. Nous nous devons de connaître ces lieux parfaitement et je dois vous confier que mon intinct excelle dans ce domaine. Les iris verts semblèrent se perdre un instant. Ces cachettes me font penser à celles d'enfants, ou d'adolescents se prenant pour Zeus et Ganymède. L'évocation du mythe lui était venue naturellement et l'écho qu'elle renvoya dans ces souvenirs enfouis le laissa soudain muet. Flash...lui, Christian, se trouvait dans la peau de quelqu'un jouant le rôle de Zeus. Il surplombait un autre jeune homme, son prince de Troie, fin aux traits presque féminins qui le fixait de ses yeux ambrés. Christian passa une main un peu tremblante dans ses longs cheveux bruns visiblement troublé. Veuillez m'excuser...mais cet endroit, cette salle de bal agit de façon étrange sur moi. Elle me terrifie presque, comme si j'allais y mourir un jour ou l'autre. Je dois trop abreuver mon imaginaire avec mes lectures. Christian s'approcha de son supérieur, le dépassa d'un pas et se posta à égale distance mais en étant à quelques enjambées de la sortie. Il en devenait claustrophobe dans cette maudite salle de bal.
|
|
|
|
Mr. H.
Identité Âge: 28 ans Relations:
|
Sujet: Re: Bitter sweet memories [Christian] Dim 24 Mai - 15:27 |
|
|
Non. Le « non », courtois et sec, avait broyé le cœur de Mr. H. En un instant, il était redevenu l’adolescent amoureux fou qui essuyait de nouveau le refus gentil mais ferme de son cousin. Il se vit faisant la moue, puis revenant à la charge pour essayer de convaincre un Gerald patient de lui donner un baiser. Juste un. Mais il n’en avait jamais été question. Pourtant, malgré l’abîme qui semblait séparer Christian de Gerald, il y avait bien quelques souvenirs. Le souvenir, par exemple, de deux enfants qui s’amusaient dans cette grande pièce richement décorée. Je t’ai trouvé, Iris ! Et un regard échangé, lourd de sens, Iris se penchant pour cueillir un baiser sur ces lèvres entrouvertes. Et Gerald, qui le repoussait finalement, se détournant de lui sans rien dire. À toi de me chercher... Mr. H. frissonna, et tandis que Christian le regardait, il observa les traits tant aimés. Dans le passé, il n’avait pu observer ce visage que quelques minutes. Le temps de sentir le désespoir, la colère, la haine, la douleur l’envahir et le submerger. ... y mourir un jour ou l’autre... Et les souvenirs déferlèrent, soudain rappelés à son esprit comme si quelques mots avaient ce pouvoir. Un bal, pour fêter un retour. L’excitation, la crainte, dissimulées derrière un masque de vertu comme son père aimait tant en voir. Le cœur qui battait la chamade. Les retrouvailles et... la déception. Il s’était marié. Gerald ne l’avait pas attendu. Comment aurait-il pu, après onze années ? Et elle était belle, et douce, et aimable, et parfaite. Et Gerald lui tenait le bras, et il lui avait à peine accordé un regard. Puis le feu. Le feu qui ravage tout sur son passage. Pouvait-il réellement être si vieux ? Avait-il vraiment connu cet endroit par le passé, ou était-ce les souvenirs d’un spectre ?
– Je suis désolé..., murmura-t-il, soufflé par la violence soudaine de sa mémoire. Ce n’était pas ce que je voulais.
Tuer Gerald ? Non, bien entendu ! Oh, il avait voulu que tout le monde souffre autant qu’il souffrait. Il avait voulu qu’ils comprennent. Engoncé dans un carcan de bienséance et de droiture, il avait enduré onze années de souffrances et de privations, et tout ça pour quoi ? Pour supporter cette vision, cet enfer, Gerald aimant une femme ? Alors oui, il avait voulu hurler sa douleur. Mais ça... ça, il ne l’avait pas souhaité. Pas à ce point. À présent retentissaient dans son esprit les hurlements, les pleurs, le crépitement des flammes et le fracas du bois qui se brise sous la chaleur insoutenable. La voix de son père, tant haïe. Ne fais pas ça, Iris ! La chaleur, il la sentait encore sur sa peau. Il sentait l’odeur des chairs qui se consumaient, il voyait le ballet grotesque de ces corps ravagés par le feu. Il se souvenait. L’espace d’un instant, il se souvenait. C’était comme dans son cauchemar, celui qui revenait le hanter chaque nuit, provoquant l’insomnie dont il était la victime. C’était l’Enfer. Tournant le dos à Christian, Mr. H. porta les mains à ses oreilles pour tenter de faire taire les cris. Comment avait-il pu provoquer cela ? De cela, au moins, il n’en gardait pas la trace dans son esprit. Quelque chose lui disait qu’il aurait perdu la raison s’il avait su. Et Christian, dans tout cela, qui était-il ? Venait-il le tourmenter pour ses péchés ? Était-il son démon, son ange vengeur, venu lui rappeler les atrocités qu’il avait commises ?
– Gerald...
Non, pas Gerald. Gerald l’aurait étreint pour le rassurer. Même s’il n’avait jamais été plus loin, il avait au moins montré ces marques d’affection. Mr. H. entendait encore sa voix. Ne pleure pas, Iris. Je suis là. Après quelques instants, il finit néanmoins par reprendre le contrôle de ses émotions et se tourna vers Christian, affichant un visage presque serein. Non, ça ne pouvait pas être qu’une simple ressemblance. Il y avait autre chose. Il devait y avoir autre chose. Mr. H. aurait donné tout ce qu’il possédait pour en avoir le cœur net. Ah, s’il avait pu obtenir son pardon... S’il avait pu l’entendre dire que ce n’était pas grave, qu’il ne lui en voulait pas, et qu’il n’était pas là pour le tourmenter... Ian... Il voulait voir Ian. Oublier Christian, Gerald, faire partir plus vite ces souvenirs qui, à peine remontés à la surface, commençaient déjà à disparaître vers les tréfonds de son esprit troublé. Se raccrocher à quelque chose de réel, de vrai. Il contempla ce visage, ces yeux d’émeraude, ces cheveux dans lesquels il avait si souvent glissé ses doigts par le passé.
– Pardonnez-moi, murmura-t-il enfin, mal à l’aise. Il y a longtemps... j’ai connu quelqu’un qui vous ressemblait.
Le « non » catégorique de Christian lui revint en mémoire. Non, il ne se souvenait pas de cet endroit, des gens qui y vivaient. Non, il ne se souvenait pas d’un adolescent aux cheveux de jais qui serrait sa main avec tendresse. Un adolescent qui avait donné le peu qu’il lui restait pour obtenir vengeance... et qui l’avait regretté durant plus de quatre-vingt ans.
|
|
|
|
Invité
|
Sujet: Re: Bitter sweet memories [Christian] Dim 24 Mai - 17:25 |
|
|
En une année, Christian s'était retrouvé seul avec Mr. H. que très rarement. Il s'était présenté à chaque invitation, avait bu du thé en sa compagnie en restant droit et distant. Mais ces moments qui auraient dû être ceux de la détente, ne trouvaient jamais de sérénité. Un pesant malaise se mettait irrémédiablement à planer. Mr. H. en devenait presqu'hésitant quand à lui, Christian, il restait égal à lui-même laconique et glacial. Il savait que posséder un supérieur qui prend le temps de vous connaître était une chance, mais quelque chose d'intangible le muselait. Une retenue qui n'avait rien à voir avec de la pudeur mais se rapprocherait plus d'une crainte, d'une peur viscérale teintée de remords et d'une pointe de déception. Mr. H. ne laissait guère indifférent et la première fois que Christian croisa son regard il revit instantanément les grands jardins qu'il venait de traverser. Deux adolescents étaient assis sur l'herbe dans l'ombre fraîche d'un arbre. Celui qui avait les cheveux les plus foncés demandait à l'autre s'il pouvait rester ici pour toujours. Valentine avait mis cela sur le compte de la fatigue dûe à son long voyage depuis Canterbury et à la présence d'adolescents dans High Creek. Mais les deux jeunes personnages refirent de fréquentes apparitions autant au plus profond de la nuit dans des rêves troubles qu'en plein midi sous un soleil timide. Christian se convainquait qu'il ne s'agissait que d'hallucinations dûes au stress, au contrôle permanent qu'il devait exercer sur lui et à la surveillance de l'application du règlement intérieur. Mais là, face à Mr. H. dans cette salle de bal ravagée, il devait admettre qu'il y avait une furieuse sensations de "déjà vu". Quelle frustration de savoir que l'on a sous les yeux les pièces d'un puzzle complexe mais qu'on ne comprend pas comment les agencer.
Christian prit une brève inspiration après s'être platement excusé pour son comportement si "émotif". Il n'était pas dans ses habitudes de se laisser aller de la sorte. Et tandis que ses paroles cessèrent, ce fut Mr. H. qui sembla se perdre pendant quelques secondes dans ses pensées. Le visage du directeur d'High Creek se figea et une ombre sembla passer dans ses prunelles sombres. D'une voix blanche, l'interlocuteur de Valentine reprit la conversation mais ce qu'il prononçait paraissait s'adresser à quelqu'un d'autre. ...je suis désolé...Ce n’était pas ce que je voulais..Pourtant, Christian fut touché par ces deux phrases, ces regrets sincèrement exprimés. Soudain, ce n'était plus son employeur qui se trouvait à quelque distance de lui. Ce n'était plus le directeur d'une prison pour adolescents. C'était un être humain au passé qui le hantait. Christian fit un pas vers Mr. H. et ce dernier lui tourna le dos, les mains plaquées sur ses oreilles. Valentine pencha légèrement la tête sur le côté, un pli soucieux au front. Il tendit la main vers l'épaule de Mr. H. L'ombre de ses doigts s'arrêta près de la nuque de ce dernier, elle hésita puis glissa le long de ce dos, caresse imperceptible et incompréhensible. D'où lui venait cette envie de rassurer cet homme en l'étreignant? Christian n'était pas ce qu'on pourrait appeler quelqu'un de chaleureux ou d'affectueux. Mais alors, pourquoi ce fourmillement impatient dans ses doigts, pourquoi cette impression de connaître cet énigmatique Mr. H. sans parvenir à l'exprimer clairement? C'était comme si son corps se souvenait de choses que sa tête avait effacé.
Mr. H. - Gerald...
Le prénom avait été murmuré, lancé en l'air comme si son porteur allait soudainement apparaître. Christian demeura interdit, les bras le long du corps. Une puissante vague de tristesse le fit légèrement vaciller. Des regrets familiers dont l'origine lui était inconnue lui serrèrent le coeur. Et tandis qu'il se perdait dans ce sentiment qui le submergeait littéralement, sa gorge se noua. Gerald...ce prénom lui évoquait une foule de choses qui traversèrent son esprit à la vitesse de l'éclair. Un adulte qui lui hurlait dessus. Une femme qui mourait à petit feu. Des yeux sombres qui brillaient intensément dans un visage tellement près du sien qu'il n'en distinguait pas les traits. Un souffle dans son cou. Une jeune femme aux boucles blondes. Des flammes. Gerald...il connaissait ce prénom et, il n'appartenait pas à sa vie à Canterbury...péniblement, il déglutit alors que Mr. H. lui tournait toujours le dos. Au bout de quelques instants, le directeur de High Creek lui refit face, semblant se perdre de nouveau en le contemplant.
Mr. H. - Pardonnez-moi. Il y a longtemps... j’ai connu quelqu’un qui vous ressemblait. Christian - Oh. Je suis navré que cela ravive de douloureux souvenirs. Il serra les lèvres, arrêtant les questions saugrenues qui se bousculaient et qui réclamaient une réponse. Christian croisa les bras sur sa poitrine, serrant les poings. Mal à l'aise. Il baissa le regard au sol où les lattes du plancher qui avait dû être somptueux se désolidarisaient lentement. Monsieur...tout alors vous m'avez demandé si je n'avais pas le sentiment de déjà connaître cet endroit. Je vous ai répondu que "non"...que pensez-vous...il garda la nuque courbée mais releva ses yeux sur le visage du directeur...des sensations de "déjà vu"? Le visage d'ordinaire impassible de Christian se teinta rapidement d'inquiétude et d'anxiété. Et la chose était suffisamment rare pour être remarquable.
|
|
|
|
Mr. H.
Identité Âge: 28 ans Relations:
|
Sujet: Re: Bitter sweet memories [Christian] Dim 24 Mai - 20:27 |
|
|
Tout lui paraissait tellement, tellement compliqué. Alors que, dans son dos, Christian hésitait, Mr. H. faisait tout pour repousser les souvenirs terribles qui l’assaillaient, ceux-là même qu’il espérait retrouver depuis si longtemps. Il y avait quelque chose. Quelque chose sur laquelle il ne parvenait pas à mettre le doigt. Parfois, il était persuadé d’avoir Gerald en face de lui, et parfois, il était certain que Christian n’avait absolument rien de commun avec son cousin. Et cela, c’était tellement compliqué. Et puis, soudain... la porte ouverte. Mr. H. écarquilla les yeux. Le déjà-vu ? Il tendit la main, prêt à prendre celle de Christian pour la serrer dans la sienne, pour lui rappeler ce qu’ils avaient partagé par le passé. Qui sait, Christian était peut-être... la réincarnation de Gerald ? Oui... oui, c’était sûrement ça ! Voilà pourquoi il lui ressemblait tant, voilà pourquoi il ne se souvenait de rien, seulement de « déjà-vu ». Il eut envie de se jeter contre lui, comme avant, de le serrer dans ses bras et de lui murmurer à l’oreille tout ce qu’il s’était déjà dit en rêve. Mais il ne put pas le faire. On lui avait appris, à lui aussi, à se tenir droit, à rester calme, à contenir ses émotions. Il ne bougea pas, mais bien sûr, son visage ne parvint pas à masquer l’excitation et l’espoir qu’il ressentait.
– Voulez-vous dire... que vous avez... l’impression d’être déjà venu ici ? Dans cette salle de bal ?
Avant le drame, ils avaient joué, ici. Ils avaient dansé, même. Gerald lui avait appris les rudiments de la valse, lui disant que cela lui servirait sûrement le jour où il se marierait. Iris avait répondu qu’il n’avait pas la moindre intention de se marier. Ils s’étaient regardé, en silence... Mr. H. aurait voulu pouvoir s’approcher plus, le toucher. Un simple contact aurait peut-être ravivé d’autres souvenirs. Christian aurait peut-être réalisé d’autres choses. Mais le toucher, c’était revivre des moments douloureux. Prendre le risque d’être repoussé à nouveau.
– Lorsque j’étais jeune, je jouais ici avec...
Il s’interrompit. Lorsqu’il jeune, il jouait ici ? C’était impossible. Il n’avait pas pu connaître cet endroit en bon état. Qui pourrait croire cela ? Qui pourrait croire qu’il avait vécu assez longtemps pour pouvoir jouer ici dans son enfance ? Personne. Et pourtant. Combien d’heures avaient-ils passé ensemble à jouer à cache-cache dans couloirs de High Creek ? Alors, cela voulait finalement dire qu’il avait toujours vécu ici ? Oui... Sûrement... Il fit un pas vers Christian et osa, enfin, poser une main sur ses bras croisés. Si le jeune homme se souvenait avoir joué, lui aussi, avec un autre garçon, cela voudrait signifier qu’ils s’étaient bel et bien connus par le passé. Ses doigts créèrent une légère pression, comme pour s’approprier ce corps dont il avait toujours rêvé, et il plongea son regard dans celui du Gardien. Il aurait voulu pouvoir lui parler sans toutes ces marques de respect et de courtoisie qu’ils s’imposaient, lui parler comme au jeune homme qu’il avait cherché à séduire. Au moins comme à un ami. S’il avait osé, il aurait posé sa main sur sa joue, non sur son bras. Mais il ne le pouvait pas. Ce n’était pas vraiment Gerald. Ce simple contact, pourtant, raviva tout le désir et tout les sentiments qu’il avait pour son cousin. Il n’oubliait pas Ian, non, mais à cet instant, seuls les souvenirs de sa vie perdue l’assaillaient.
– Ces impressions de déjà-vu... Quelles sont-elles ? Est-ce... simplement l’impression d’être venu ici, ou d’autres souvenirs ?
Son regard supplia presque Christian. Si seulement, si seulement il avait pu lui dire qu’il se souvenait de tout... Dans ses rêves les plus fous, cela arriverait sans doute, mais pas dans la réalité. Mais ils avaient une petite chance, peut-être... Une toute petite. Si Christian le regardait droit dans les yeux, peut-être pourrait-il y lire tout l’espoir que Mr. H. avait encore. Il aurait juste fallu qu’ils mettent, tous les deux, leur éducation de côté.
– Il vous ressemblait, murmura-t-il. Il vous ressemblait tellement...
Et sa main se tendit, à nouveau, pour effleurer la joue de Christian. Ils n’avaient jamais été aussi proches. Peut-être était-ce ce qui leur avait toujours manqué.
|
|
|
|
Invité
|
Sujet: Re: Bitter sweet memories [Christian] Dim 24 Mai - 22:45 |
|
|
Mr. H. était la clé. De quelle façon, il ne pouvait pas l'appréhender, mais le directeur pouvait peut-être l'aider. Ces "déjà vu" qu'il vivait depuis son arrivée à High Creek pourraient donc avoir un sens. Mr. H. resta calme mais son visage trahissait la fébrilité qui venait de s'emparer de lui. Il leva la main dans sa direction en hésitant avant de la laisser retomber. Les pans d'un voile qui obscurcissait tout étaient en train de se soulever inexorablement. Avec lenteur, les pièces de l'inompréhensible puzzle trouvaient sa voisine. Il se passait quelque chose d'important, quelque chose de crucial. La clé semblait avoir trouvé sa serrure et faisait jouer le pêne. Tels Pandore devant sa boîte, ils s'apprêtaient à libérer une quelconque force.
Mr H. - Voulez-vous dire... que vous avez... l’impression d’être déjà venu ici ? Dans cette salle de bal ? Christian - J'ai des images furtives de ce qu'était cet endroit avant l'incendie. Il leva la main et agita les doigts au niveau de ses tempes. Ca survient de façon incontrôlable et rapide. J'assiste à des événements en tant qu'acteur et spectateur. Je vois des images qui me sont familières mais que je suis persuadé ne pas avoir vécues. Seigneur, ça semble tellement insensé et peu croyable. Devenait-il fou? Imaginait-il des spectres qui pouvaient prendre possession des vivants? Christian avait lu tellement de littérature fantastique allemande qu'il commençait à se dire qu'il était en train de vivre dans un bien étrange roman où l'auteur oscillait encore sur la suite à donner aux aventures de ses personnages. Mr. H. - Lorsque j’étais jeune, je jouais ici avec...la voix de Mr. H. s'arrêta soudain. Inutile de faire un calcul pour se rendre compte qu'il était empiriquement parlant impossible que le directeur de High Creek ai vécu aussi longtemps. Surtout en conservant une apparence jeune.
Christian fronça légèrement les sourcils se souvenant d'un cauchemar, l'un des rares qui habitaient ses nuits, qu'il avait fait avant de quitter Canterbury. Il avait découvert à son réveil quelques notes griffonnées d'une main tremblante et à l'aide d'une sténo approximative. Il était nu, suspendu dans des ténèbres impénétrables. Il était handicapé de ses cinq sens. Il ne souffrait ni de la faim ni de la soif, ni du froid ni du chaud. Malgré ses yeux ouverts, il ne distinguai absolument rien. Il se tenait debout mais il ne sentait aucun sol sous ses pieds, aucun mur à ses côtés. Le silence l'entourait et même s'il essayait de parler aucun son ne sortait de sa bouche. Tout était inodore. Et soudain, une voix s'était élevée, désincarnée, grave et cynique. Les mots s'étaient entrechoqués dans sa tête meurtrissant ses tympans. Il n'était pas parvenu à se souvenir parfaitement de ce que la voix lui avait dit. Mais il se souvenait d'une des rares phrases qu'il put retenir. Elle prétendait que H a une vie incroyablement longue. Il était question également d'autres "clauses" mais Valentine ne parvenait pas, pour le moment, à s'en rappeler. Mr. H. fit un pas dans sa direction, s'approcha de lui et posa la main sur un de ses bras croisés, les doigts du directeur serrèrent son poignet comme si Christian allait s'évaporer. Cet anodin petit geste trouva des échos dans la mémoire tronquée de Christian. L'adolescent aux yeux ambrés qui essayait de l'attirer contre lui et lui qui le repoussait doucement.
Mr. H. - Ces impressions de déjà-vu... Quelles sont-elles ? Est-ce... simplement l’impression d’être venu ici, ou d’autres souvenirs ? Christian - C'est la première fois depuis mon arrivée que j'en parle. Parfois c'est comme deux images qui se superposent. Le décor est sensiblement identique mais les personnages changent. Par exemple, ici, je serais capable de décrire toute la fresque du plafond alors qu'elle est à demi détruite, le dernier bal qui y a eu lieu...où je suis...où "il" était?! il n'acheva pas sa phrase. Christian ferma les yeux. Les cris de son rêve se firent entendre de nouveau, envahissant ses oreilles. Il ferma plus fermement les paupières. Mr. H. - Il vous ressemblait. Il vous ressemblait tellement...un contact léger effleura sa joue. Christian leva la main la posant sur celle du directeur avant d'ouvrir brusquement les yeux. Christian - Je vous connaissais...mais pas en tant que Mr. H. Gerald...ce prénom était associé à un autre. Un fils de Lord au nom de fleur. Hyacinth. Iris...il plongea son regard dans celui de H, se perdant dans les ombres peuplant ces prunelles à la fois inconnues et familières. D'une voix lointaine, il chuchota comme une confidence, et vous m'étiez très cher. Christian eut l'impression qu'un poids était délesté de ses épaules. Comme si ces paroles avaient été retenu trop longtemps. Pourquoi ce soulagement? Et qui était-il réellement? S'appelait-il Christian Valentine ou était-il Gerald Neville?
A Canterbury, Christian avait très vaguement entendu parler des nouvelles croyances qui faisaient leur apparition dans les sphères des intellectuels. L'Angleterre accueillait nombres d'immigrés qui venaient avec leur culture, leurs rites et leurs divinité. Une de ses récentes religions, celle qui remportait un plus vif succès, parlait des vies que notre âme avaient déjà traversé...Christian ne se rappelait même ce qu'il avait fait il y a deux ans, alors une vie au-delà de sa naissance était difficilement envisageable. Mais toutes ces superstitions asiatiques, qu'il mésestimait et méprisait presque, prenaient tout à coup une autre dimension.
|
|
|
|
Mr. H.
Identité Âge: 28 ans Relations:
|
Sujet: Re: Bitter sweet memories [Christian] Dim 24 Mai - 23:24 |
|
|
Il y a des secrets trop lourds pour être supportés toute une vie. Des regrets trop douloureux pour être tus. Mr. H. avait pourtant tout conservé, durant toutes ces années. Il avait caché la souffrance, caché la tristesse, pour que rien ne vienne entacher son travail. High Creek’s Jail avait toujours passé avant tout. Jusqu’à Ian. Quand il s’était rendu compte qu’il éprouvait des sentiments pour son secrétaire, un immense poids avait quitté sa poitrine et il avait cru pouvoir revivre en oubliant le passé. Mais les souvenirs l’avaient rattrapé. Les souvenirs, et Gerald. Christian lui parlait de ses rêves, de ses bribes de mémoire qui lui parvenaient parfois, et il avait le sentiment que quelqu’un avait usurpé leurs souvenirs pour les tourmenter tous les deux. Christian ressemblait à Gerald, et avec ses aveux, il devenait évident qu’il était bien plus qu’un simple sosie. Mr. H. frissonna lorsque la main du Gardien se posa sur la sienne, et plus encore à ses paroles. Son cœur se serra lorsqu’il prononça son nom. Iris. À sa connaissance, personne ici ne le connaissait, à l’exception de Ian. Comment Christian, un parfait inconnu, aurait-il pu savoir cela ? ...et vous m’étiez très cher. Les yeux de Mr. H. s’embuèrent de larmes. Il avait rêvé de cet instant tous les jours depuis la mort de Gerald, et plus encore lorsque Christian était arrivé à High Creek. Il avait alors espéré pouvoir se blottir contre son cousin et lui demander pardon, lui demander du temps pour tout recommencer. Et c’est ce qu’il fit. Il ouvrit les bras et les passa autour du Gardien, comme dans un rêve, un merveilleux rêve, celui qu’il ne faisait qu’éveillé. Sa tête trouva tout naturellement sa place sur l’épaule de Christian et il ferma les yeux pour réprimer ses larmes.
– Gerald...
Un murmure, un souffle, rempli d’un espoir nouveau.
– Je suis Iris, confia-t-il d’une voix vibrante d’émotion. Nous avons joué ensemble ici, rappelle-toi...
Il serra le Gardien contre lui, avec toute la force dont il était capable, pour ne pas se voir repoussé comme par le passé. Il tremblait. Il avait peur d’être soudain raillé, d’être rejeté, ou simplement que Christian – ou Gerald ? – se souvienne et le haïsse pour ce qu’il avait fait. Pour la première fois depuis des semaines, Christian et lui prenaient le temps de parler, de s’ouvrir l’un à l’autre, et il y avait peut-être une chance pour que leurs souvenirs reviennent. Mr. H. aurait voulu se confondre en excuses. Il aurait voulu sentir les bras de Gerald autour de lui. Il aurait voulut se laisser aller, enfin, sans personne pour les voir, sans personne pour les obliger à s’écarter l’un de l’autre. Simplement profiter de ces retrouvailles, celles dont on les avait privés par le passé. Mais il ne pouvait plus. Il y avait Ian. Et malgré tout l’amour qu’il éprouvait encore pour Gerald, il s’était découvert l’envie de vivre quelque chose qui le séparerait complètement de High Creek. Il avait des sentiments pour Ian. De vrais sentiments. Et à cet instant, il était tiraillé entre cet amour naissant, réconfortant, lumineux, et le besoin de sentir le corps de Gerald contre le sien, comme par le passé. Honteux, rougissant, ressemblant soudain davantage au garçon de 15 ans qu’à l’homme mature qu’il était à présent, il s’écarta de Christian, sans oser lever les yeux vers lui. Il avait sans doute été trop loin. Il avait sans doute fait trop. Comme toujours.
– Pardonnez-moi... je ne sais pas ce qui m’a pris...
Oh, si, bien sûr qu’il savait. Son cœur battait la chamade, exactement comme celui de l’amoureux transi qu’il était autrefois. Comment Christian pouvait-il savoir toutes ces choses ? Comment pouvait-il les connaître tout en ignorant le reste ? Mr. H. posa une main sur ses lèvres pour en cacher leur tremblement. Son regard fuyait celui du Gardien, et il fit un nouveau pas en arrière.
– Croyez-vous... que vous puissiez avoir vécu cette autre vie ? demanda-t-il d’une voix hésitante.
Il aurait souhaité que ce ne fût pas le cas. Il voulait juste qu’il soit Gerald, non un semblant de fantôme ou de réincarné. Ah, pourquoi le temps avait-il passé si vite ? Pourquoi avait-il fallu qu’ils soient séparés si longtemps ? Pourquoi, simplement, ne les avait-on pas laissés vivre la vie qu’ils espéraient ?
|
|
|
|
Ian MacCartaigh
Identité Âge: 26 ans Relations:
|
Sujet: Re: Bitter sweet memories [Christian] Dim 24 Mai - 23:28 |
|
|
Ian espérait fort ne pas se faire étriper par Jonathan Dugard. Passé par les jardins et le potager, il s’était allègrement servi dans les différentes plates-bandes pour confectionner un bouquet à peu près acceptable (si on excluait le fait que faisaient partie de sa composition florale des fleurs de pomme de terre). Ça l’amusait, les vrais trucs d’amoureux. Il n’avait pas encore acheté de boîte de chocolats à son Êta, mais ça viendrait peut-être. Leur quasi-lune de miel durait depuis un moment déjà et il espérait de tout cœur qu’elle ne prenne jamais fin… du moins, pas de la façon brusque qu’elle connut, alors qu’il s’approchait de la salle de bal.
En huit ans, malgré son caractère lunatique, le secrétaire avait pu remarquer que son employeur disparaissait quelques heures, lorsque le travail qu’ils abattaient chaque jour ralentissait son rythme. Ian n’avait jamais cherché à connaître la raison de ces absences sporadiques, d’abord parce qu’il était beaucoup trop concentré sur ses propres recherches, et ensuite, parce que les secrets du directeur d’High Creek’s Jail devaient justement demeurer des secrets.
Cette fois-ci, cependant, le jeune homme s’était alloué le droit de rejoindre m’sieu Êta dans ses excursions. Il cessa d’avancer en entendant des voix. Deux voix. L’une qu’il connaissait bien, qui l’emplissait d’une bienheureuse chaleur, et une autre, qu’il n’avait entendue qu’à quelques reprises. Il fit fonctionner sa mémoire à plein régime, son cerveau survolant le nom de chaque dossier, les photos, les souvenirs… Valentine, Christian. Il esquissa quelques pas, sa silhouette fine se dissimulant derrière une lourde tenture, à la veille de s’écrouler, tant elle avait été rongée par les mites, le temps et les flammes.
Un seul mot lui vint en tête en découvrant la scène qui se déroulait sous ses yeux. Déjà? À peine une semaine s’était écoulée depuis ce soir où McEndrews, Elliot lui avait tailladé le torse, le dos, une semaine depuis qu’Ian et son patron avaient surmonté leurs réserves, s’étaient abandonnés à leurs sentiments naissants. Déjà. Déjà, c’en était terminé pour le directeur, il s’était lassé et s’était déjà, déjà tourné vers un autre. Le sourire de l’autre gardien lui revint en tête, tout comme ses paroles moqueuses.
« Alors c’est toi le nouveau sex toy de notre petite fleur ? »
Le bouquet qu’il tenait à la main tomba par terre. Déjà… On avait obtenu de lui ce qu’on voulait. Il avait perdu la seule valeur, la seule chose au monde qui aurait pu le rendre rare aux yeux de m’sieu Êta : sa pureté. Oh, sans doute qu’il demeurerait secrétaire, jusqu’ici, du moins, il s’était montré irremplaçable dans le domaine de la paperasse. Mais, tel qu’il l’avait craint, dans celui de la débauche, il n’était devenu qu’un papillon de plus, épinglé à l’étaloir d’un chasseur prolifique.
« Fonce et n’hésite pas mais n’oublie pas. Tu ne seras jamais le seul pour lui tout comme je ne l’ai jamais été. »
Quel idiot il avait été, de penser que lui, d’entre tous, aurait été capable de le retenir. Que ses étreintes – oh, et que ses cuisses – à lui étaient plus accueillantes. Quelle jolie putain il faisait désormais ou plutôt, quelle triste putain vouée à un seul maître qui ne la désirait déjà, déjà plus. Lui qui s’était toujours gardé, pendant vingt-six ans d’existence, de toute promiscuité… Comme il regrettait d’avoir renoncé à ses principes…
« Que c’est attendrissant ! Quelle détermination ! Je te félicite, j’espère seulement pour toi que lorsque tu le prendras en flagrant délit d’adultère, tu ouvriras enfin les yeux. »
Il avait affirmé qu’il l’accepterait, qu’il souhaitait seulement se trouver auprès de son m’sieu Êta. C’était toujours vrai. Il savait pertinemment qu’il ne cesserait jamais de le désirer. La loyauté d’Ian, une fois obtenue, s’avérait indéfectible. Il était d’ailleurs fort improbable qu’il cherche du réconfort dans les bras d’un autre. Malmené par sa présente relation, il n’irait pas à la rencontre de nouvelles peines. S’il assumait donc avoir donné son cœur en offrande à un homme qui n’en avait visiblement cure, cela ne signifiait toutefois pas qu’il devait s’imposer la vision des infidélités de ce dernier. Tournant les talons, il quitta la pièce sans mot dire, ses pieds foulant les décombres lui rappelant sa propre âme, mise à feu et à sang, incendiée par une douleur plus terrible encore que celle qui avait vu naître ses tatouages. Déjà…
|
|
|
|
Invité
|
Sujet: Re: Bitter sweet memories [Christian] Sam 30 Mai - 17:02 |
|
|
HRP : Désolée du retard, on m'a prêté la saison 3 de Desperate Housewives...et fallait que je la mate en une semaine ^^"
Ces sentiments qui l'égaraient de plus en plus loin, ces souvenirs d'une autre époque qui jaillissaient d'une mémoire en état de latence depuis trop de mois donnait l'impression à Christian que tout se dissolvait autour de lui. Cette réalité, ce monde qu'il connaissait, Canterbury et sa vie là-bas étaient comme autant de murs qui tombaient avec fracas. Sa raison s'effritait lentement, comme victime d'un souffle âcre et érosif qui dispersait les ultimes lambeaux d'une personnalité qui n'avait été qu'une mystification. Christian Valentine s'effaçait comme s'il n'avait jamais été... Iris, les yeux brillants, ouvrit les bras et, les passant autour de sa taille, vint se blottir contre le gardien. Posant sa tête contre son épaule, le directeur de High Creek serra contre lui ce corps qui le hantait depuis près d'un siècle. En vagues successives, Gerald Neville reprenait conscience, comme un fantôme trop longtemps consigné dans un réceptable bien trop petit pour lui. Iris murmura, ses lèvres frôlant son oreille, son souffle léger le faisant frissonner. Gerald...comme un voeu que l'on confesse d'une voix basse dans les heures les plus solitaires de la nuit. Gerald...comme la supplique d'un martyr qui a trop souffert et qui espère renaître dans la Lumière. Gerald...comme le prénom de l'être aimé que l'on prononce tel un mantra pour se donner du courage.
Mr. H. : Je suis Iris. Nous avons joué ensemble ici, rappelle-toi...Des paroles qui m'emmenèrent des années en arrière. Avant que tout ne s'enchaîne, avant que tout ne lui soit ravit.
____
Gerald : Comment? Tu ne sais pas danser la valse? Il leva les yeux au ciel en soupirant. Décidemment, c'est une chance que je sois venu me perdre ici. Quel genre de gentleman ne sait pas mener une valse? Viens ici, de suite. Avec un ton faussement impérieux, le petit bourgeois s'empare de la main du fils de Lord, le forçant à se lever de son siège et à quitter l'assiette de pâtisseries qu'ils venaient de dérober dans les cuisines. Posant une main sur le taille fine d'Iris, Gerald le serre contre lui, levant leurs mains serrées. Tu es prêt? Iris opine du chef. Tournant la tête offrant sa joue aux lèvres de son hôte, Gerald emmène doucement son partenaire. Avec patience, il lui explique le passage des différents appuis. Du bout des lèvres, il compte les pas. Iris lui marche sur les pieds, parfois ils manquent de trébucher, mais Gerald le tient serré contre lui, corrigeant chaque erreur, encourageant l'autre danseur. Les minutes passent à une vitesse folle et Gerald chantonne doucement l'air d'un morceau de Brahms. Finalement, tu vois que tu y arrives? Ca te sera très utile le jour de ton mariage. Tu me remercieras plus tard.
Iris : Mais je n'ai pas du tout l'intention de me marier. Les deux danseurs arrêtent leur ronde. Le regard de Gerald croise celui d'Iris. Le temps semble se suspendre, attendant que le bourgeois saisisse tout ce que cette phrase peut bien signifier dans la bouche d'un futur Lord habitué aux aveux feutrés. Il a peur de comprendre. Il a peur de saisir finalement ce qui le trouble tant depuis quelques jours. Les jeux, les éclats de rire, les étreintes...tout semble avoir revêtu un autre aspect. Le masque de la complicité et de l'amitié s'écarte légèrement révélant un visage et des traits que Gerald ne veut nommer...ne peut nommer. Son regard glisse sur les lèvres d'Iris, son coeur s'emballe tandis qu'il déglutit avec difficulté, refoulant avec violence ce feu qui irradie son ventre;
Gerald : Ca suffira pour aujourd'hui. Avec gêne, il détourna les yeux, se séparant d'Iris. La voix moins assurée que de coutume, il poursuivit. Je crois que j'ai un peu le tournis à force de danser. Je vais aller m'étendre une heure ou deux. On se revoit au dîner. Le visage rose, Gerald tourne les talons, contrôlant son envie de courir jusqu'à ce qu'il disparaisse de la vue d'Iris. Les lèvres serrées, il prend ses jambes à son cou dès qu'il tourne dans le couloir menant aux jardins. Il avait failli céder...et il n'osait penser aux conséquences s'il s'abandonnait.
_____
Iris assura un peu plus son étreinte et Christian retrouva la salle de bal en ruines. Il sentait Mr. H. trembler avant qu'il ne le lâche. Lorsque le directeur de High Creek leva les yeux sur lui, les joues rouges, la mine déconfite, ce n'est plus l'adulte à la tête d'une prison pour délinquants. C'était l'adolescent de son passé avec sa courte crinière sombre, sa petite moue attendrissante.
Mr. H. : Pardonnez-moi... je ne sais pas ce qui m’a pris...il recula d'un pas. Croyez-vous... que vous puissiez avoir vécu cette autre vie ?
Christian : Il n'y a pas eu que des jeux ici. Je vous ai appris à danser. La valse, mais ce sont les pas de la danseuse que je vous ai enseigné. A votre mariage, vous auriez eu l'air ridicule. Il leva les yeux au plafond, s'égarant de nouveau dans la fresque ravagée. Je sais qui a déclenché l'incendie qui a ravagé cette partie de High Creek. Et j'en connais les raisons. Il y a eu une dizaine de victimes, qui ont été piégées par les flammes. Elles sont mortes en martyrs, mais une seule a été damnée. Le regard de Christian se pose de nouveau sur le visage de l'adolescent qui se trouve face à lui. Sous la chaleur des flammes, le chambranle d'une fenêtre a éclaté offrant une issue de secours providentielle. Elizabeth s'en est sortie, mais j'ai été incapable de la suivre. Le Gardien vacilla avant de se laisser tomber au sol. La tête baissée, il cacha son visage dans les paumes de ses mains. Tu ne m'as pas tué Iris, je me suis moi même jetté dans le brasier.
|
|
|
|
Mr. H.
Identité Âge: 28 ans Relations:
|
Sujet: Re: Bitter sweet memories [Christian] Sam 30 Mai - 21:15 |
|
|
Deux adolescents. L’un est fier, droit, digne. L’autre le dévore du regard. Et ils dansent, dansent, comme un couple improbable. Ils dansent et leurs regards se perdent l’un dans l’autre. Gerald et Iris. Deux cousins. Deux amis. Et tellement plus que cela. Mr. H. sentit l’air lui manquer. Son plus vieux rêve, son plus ardent désir venait de se réaliser. Ce n’était plus Christian Valentine qu’il avait en face de lui, plus le gardien anonyme que Mr. H. observait en secret – ou du moins le pensait-il. C’était lui. L’homme qu’il avait aimé depuis le jour où il l’avait revu, après une enfance séparée, peu de temps après ses quinze ans. L’homme avec qui il avait passé un mois merveilleux, et d’autres moments encore après cela. L’homme qui avait hanté ses nuits et ses jours durant toutes ces années de solitude, l’homme qu’il avait cru retrouver en lui... et c’était lui. Mr. H. resta debout, incapable de baisser les yeux ou de se pencher vers Gerald. L’espoir et la joie avaient cédé la place à la honte et au remord. Ses deux mains vinrent couvrir sa bouche pour dissimuler les tremblements de ses lèvres, mais il ne put rien faire pour empêcher ses larmes de couler. Sûrement pas des larmes de joie, ni des larmes d’enfant. Des larmes d’adulte, amères, révélatrices de la douleur sourde qui enserrait le cœur du directeur de High Creek’s Jail à cet instant. Il pleura, incapable de se retenir, de maîtriser le flux d’émotions qui l’assaillait. Tout lui revenait en mémoire, tout ce que son cerveau fatigué et vieillissant avait évacué pour faire de la place aux nouveaux souvenirs, comme on oublie les souvenirs d’enfance pour se rappeler les choses les plus récentes. La souffrance, le désir que tout le monde sache à quel point il avait mal, le désir de vengeance pour ces années perdues, volées, arrachées, le feu, les hurlements, les pleurs, la voix de Gerald criant son nom. Et lui, debout au milieu du carnage, miraculeusement épargné par les débris qui tombaient et les flammes qui détruisaient tout sur leur passage. Tout était sa faute. Il n’avait pas voulu ça, pas comme ça, mais c’était arrivé parce qu’on lui avait promis qu’il obtiendrait vengeance. Mais pas comme ça...
– Je suis désolé, sanglota-t-il, toujours debout, raide et droit comme on le lui avait appris à coups de bâton. Je suis tellement désolé. Ce n’était pas ce que je voulais... Je suis désolé...
Et les larmes coulaient, marques d’une souffrance contenue durant tant de temps qu’il en avait perdu le compte des années. Oh, non, il n’avait pas voulu ça. S’il avait su qu’accepter cette vengeance entraînerait la mort de celui qui comptait plus que tout pour lui, il aurait refusé. Mais il avait perdu l’esprit, lorsqu’il l’avait vue, elle, son bras glissé sous celui de Gerald, lorsqu’il avait vu quel bonheur faisait briller ses magnifiques yeux. Il les avait haï, elle, lui, son père qui les avait séparés, sa mère qui n’avait rien fait pour l’en empêcher, et lui-même, inutile et trop fade pour attirer le regard de son cousin. Il avait haï tout le monde, tous ceux qui riaient et qui s’amusaient alors qu’il avait envie de mourir sur place. Et la vengeance était arrivée, cruelle et implacable. Tous étaient morts. Tous sauf elle. Quelle ironie ! Il avait voulu mourir après cela. Il avait tenté mille choses, mais ni le froid de l’acier, ni la chaleur du poison, ni la rudesse d’une corde, rien n’avait pu lui apporter le salut. Tu me les apporteras, et elles m’appartiendront toutes. Je te donnerai les moyens pour cela. La voix retentissait de nouveau dans son esprit. Il porta les mains à sa tête pour la faire taire. Il avait souffert tellement longtemps que l’Enfer n’était plus pour lui que le pâle reflet de sa vie. Jusqu’à ces derniers jours. Jusqu’à ce qu’un minuscule petit point de lumière irradie l’obscurité dans laquelle il avançait jour après jour. Ian. Mr. H. sentit ses larmes se tarir alors que le visage de son secrétaire se formait derrière ses paupières closes. Ian... Il avait besoin de le voir. Un besoin si fort qu’il en fut stupéfait. Ses yeux se posèrent sur Gerald. Son cœur chavira. Pourquoi maintenant ? Était-ce pour le torturer à nouveau ?
– Est-ce que tu es là... pour te venger, toi aussi ?
Les sanglots l’agitaient toujours. Avait-il peur ? Non. Non... Il voulait mourir depuis si longtemps... Mourir. Fermer les yeux et ne plus jamais les ouvrir, dormir éternellement. Quel Enfer lui réserverait-on ? Aurait-il à revivre, encore et encore, la mort de celui qu’il avait aimé ? Lui ferait-on croire à la mort de Ian, de toutes les façons imaginables ? Ou serait-il simplement abandonné, sans personne pour combler ce besoin maladif qu’il avait de tenir quelqu’un contre lui ? Maintenant que tout semblait enfin s’éclairer pour lui, était-ce le juste retour de flammes ? Ian, Gerald. Tout était confus. C’était trop, trop d’un seul coup. Mais il laissa ses paupières s’abaisser, prêt à recevoir le châtiment qu’il avait mérité.
|
|
|
|
Invité
|
Sujet: Re: Bitter sweet memories [Christian] Ven 5 Juin - 20:40 |
|
|
Toujours au sol, le Gardien subissait en serrant les dents l'assaut de ces images qui étaient apparues dans ses rêves et qu'il pensait n'être que de banals songes. Il avait l'impression que ses tempes pulsaient, que son crâne allait se fendre sous la pression de ces souvenirs qui lui appartenaient bel et bien et dont il reprenait violemment conscience. Le voile était levé et Valentine, sa vie virtuelle et sa personnalité sombraient dans le néant ne laissant qu'un Gerald perdu. Il n'était pas mort de façon "naturelle" mais avait choisi délibérément la chaleur des flammes à une sortie salvatrice. Il avait violé ce serment qu'il avait prêté à Elizabeth lors de leur mariage. Il était damné pour ce geste, avoir gâché cette vie qu'on lui avait offerte, ultime cadeau qu'il avait bafoué. Il s'était retrouvé dans cet endroit irréel pendant une longue période. Il aurait été incapable d'en donner une estimation. Aucun repère temporel dans cette prison qui représentait sa terreur la plus profondément ancrée. En se condamnant à la mort, Gerald avait cherché à fuir cette solitude, cette sécheresse affective qui allait racornir son coeur. On a beau savoir mentir, vivre dans le mensonge nécessitait un courage qu'il n'avait malheureusement pas et qu'il n'aurait jamais eu. Il aurait été incapable de continuer à vivre auprès de son épouse en sachant qu'Iris était là...si proche de lui et pourtant tellement loin. Il n'aurait pu donner à sa femme les enfants qu'elle désirait et elle était bien trop bonne pour engendrer des bâtards qu'il aurait reconnu comme siens par la suite, pour sauver les apparences.
A travers les mèches brunes qui barraient son visage, un regard émeraude se posa sur le visage d'Iris qui trahissait son dilemme. Combien de temps s'était écoulé depuis leur dernière rencontre? Soixante ans? Quatre-vingts? Le fils de Sir Hyacinth n'avait pas vieilli. Alors que lui-même croupissait dans une geôle terrifiante à la frontière du néant, que se passait-il pour Iris? Il y avait une étrange barrière entre eux deux, une barrière que Gerald ne pouvait franchir. En silence, les larmes roulèrent sur les joues du directeur d'High Creek tandis que ses épaules étaient agitées par des sanglots muets.
Mr. H. : Je suis désolé. Je suis tellement désolé. Ce n’était pas ce que je voulais... Je suis désolé...Gerald posa une main sur son genou et se releva, faisant face à Iris. Ce dernier baissa la tête, enserrant entre ses doigts sa tête, comme si des voix désincarnées lui parlaient et qu'il voulait les faire taire. Si seulement le Gardien avait disposé de ce pouvoir, il aurait ôté le poids de cette culpabilité des épaules frêles de son cousin. Lorsqu'il posa de nouveau les yeux sur lui, une question fusa. Est-ce que tu es là... pour te venger, toi aussi ? Gerald pencha légèrement la tête sur le côté, comme il avait l'habitude de le faire lorsqu'il réfléchissait. Hésitant, il posa ses mains sur les épaules d'Iris. Gerald : Me venger? Pourquoi voudrais-je me venger? Je ne voulais pas de l'existence qui était en train de se dérouler sous mes pas. Du bout des doigts, il essuya les traces humides qu'avaient laissées les larmes d'Iris sur ses joues. Je sais que je suis maudit, mais j'ignore les raisons de ma présence ici et pourquoi je réapparais en ce jour précis. Si c'était un nouveau châtiment, toute l'ironie de ce dernier allait forcément surgir à un moment ou à un autre et Gerald sentait que cela allait être très, très douloureux. Restait à savoir comment les enfers allaient s'y prendre pour les blesser cruellement alors qu'ils venaient juste de se "retrouver". Iris avait toujours les yeux clos et le Gardien se retint de serrer ce corps contre lui, d'enfouir son visage dans ces cheveux de jais. Il avait passé sa courte vie à l'éviter, à se dérober, à détourner sans cesse la tête lorsqu'Iris cherchait à lui voler un baiser. Gerald poussa un petit soupir, sa main s'égarant quelques secondes aux pointes des mèches sombres d'Iris, frôlant légèrement la peau fine de son cou et de la courbe de sa mâchoire, avant de poursuivre, murmurant. Je n'ai reçu qu'une unique recommandation. Ses doigts glissèrent sur la nuque du directeur d'High Creek. Son visage se rapprocha de celui du très respecté Mr. H. Son souffle effleurait ses lèvres. Je dois te servir fidèlement et t'obéir aveuglément. Quels sont tes ordres, Iris?
Il ne devait prendre aucune réelle initiative à l'égard d'Iris et là, résidait son châtiment. Sa résurrection était inextricablement liée à l'existence de Mr. H. Ce qui arriverait à l'un arriverait à l'autre. Si l'un des deux mourraient, Gerald retournerait dans sa prison de néant et qui sait ce qu'il adviendrait d'Iris? Il brûlait d'envie de lui octroyer tout ce qui lui avait toujours refusé, il était "libre" maintenant, plus de pression familiale, plus de jolie épouse...et pourtant, Gerald se sentait plus coincé que jamais. Iris était tellement proche de lui, ses lèvres qu'il avait effleuré qu'une seule fois des siennes étaient si tentantes...et il devait se contenir...ne pas prendre d'initiaves pour ne pas risquer que ce rêve ne se brise.
|
|
|
|
Mr. H.
Identité Âge: 28 ans Relations:
|
Sujet: Re: Bitter sweet memories [Christian] Dim 7 Juin - 15:48 |
|
|
Les mains sur ses épaules, la douceur des doigts de Gerald sur sa peau... Mr. H. ferma les yeux pour sentir tout cela bien mieux. C’était son cousin, c’était bien lui. Il ne pouvait plus douter à présent. Mais cette découverte tant espérée le laissait incapable de prendre la moindre décision, de faire le moindre geste. Il avait tellement peur. Il savait qu’à la seconde où il aurait un tant soit peu de bonheur, ce dernier lui filerait entre les doigts. Il en avait toujours été ainsi. Il avait peur. Peur de perdre Gerald, peur de perdre Ian, peur de se perdre lui-même au milieu de ses hésitations et de ses tourments. Il était maudit, il ne l’ignorait pas, et il savait que, quelle que soit sa volonté, il ne pourrait rien contre les forces qui s’opposaient à lui depuis toujours. Mais à cet instant, la main de Gerald sur lui avait fait disparaître l’angoisse qui l’habitait. Gerald le prendrait dans ses bras, n’est-ce pas ? Il l’étreindrait, et tout serait à nouveau comme avant. N’est-ce pas...? Mais il y avait plus en jeu maintenant qu’autrefois. Ils auraient pu être tellement heureux, si on les avait laissés tranquille. Les deux cousins auraient pu vivre loin de High Creek, n’importe où mais pas dans cet endroit lugubre. Ils se seraient aimés, en secret. Personne n’aurait eu à dire quoi que ce soit. Ils seraient morts depuis bien longtemps, mais ils seraient morts heureux. Mais le Destin était bien cruel. Pas de fin heureuse, pas de jolis papillons roses et de fleurs multicolores dans la vie d’Iris Hyacinth et de Gerald Neville. Il n’y avait que la frustration, la colère et la mort. Mr. H. savait que le Destin lui réservait encore un mauvais coup. La seule chose qui avait illuminé sa vie ces derniers temps était l’amour que lui avait manifesté Ian, et il s’était raccroché à cela de toutes ses forces avec l’espoir un peu fou que quelqu’un, là-haut, lui avait pardonné ses crimes et qu’il avait enfin droit à un répit. Vivre avec Gerald était son rêve depuis toujours. Il ne cesserait sans doute jamais d’y rêver, mais il fallait être lucide : de mauvaises fées s’étaient penchées sur leur berceau. Le diable lui-même avait mis une option sur leurs âmes à la seconde où ils avaient poussé leur premier cri. Quelle que soit leur volonté, leur espoir, leur amour, on ne les laisserait jamais s’aimer comme ils le voulaient. Et Mr. H. n’était plus sûr de vouloir se battre.
Il frémit en voyant Gerald se rapprocher de lui, quand leurs souffles se mêlèrent. Durant quelques instants, il se prit à rêver que le jeune homme l’embrasserait avec passion, libre de toute contrainte, mais il n’en fut rien. Gerald resta désespérément immobile. Tout avait été toujours été comme ça, entre eux. Gerald était toujours resté digne, distant, tandis qu’Iris quémandait son attention. Même ça, ça n’avait pas changé. C’était même pire. C’était à lui de donner les ordres, de décider de tout. Oh, oui, il mourait d’envie d’en profiter. Des dizaines d’ordres se bousculaient déjà dans son esprit. Embrasse-moi. Serre-moi contre toi. Aime-moi. Ses doigts effleurèrent les lèvres de Gerald. Un baiser... il aurait aimé sentir ces lèvres sur les siennes. Mais ça n’arriverait jamais. Ce ne serait jamais qu’un ordre, pas une réelle volonté de son cousin. Ce ne serait pas sincère. Et Mr. H. avait changé. Tellement de temps s’était écoulé. Il colla son corps contre celui de Gerald, approcha ses lèvres des siennes, jusqu’à les effleurer. Ses paupières se fermèrent. L’effleurement de leurs peaux serrait son cœur, mais il s’écarta soudain, secouant la tête avec désespoir.
– Je ne peux pas... Je veux... Je veux juste être heureux. Et nous ne le serons jamais. Tout ce que je veux, pour toi, c’est que tu sois toi-même. Tu ne l’as jamais été. Tu as toujours porté un masque et... je ne peux pas te donner d’ordre, à part : je veux que tu sois toi-même.
Il se détourna. Le visage de Ian, tellement nécessaire depuis quelques semaines, s’imposa à son esprit. Il s’en voulut de penser à un autre à cet instant, alors même que Gerald revenait à lui, mais il ne put s’en empêcher. Alors il n’y avait qu’une seule solution, qu’une seule échappatoire. La fuite. Désespérée, éperdue, la fuite à tout prix. Il tourna les talons, chercha la sortie comme si c’était la seule chance qu’il avait de s’en sortir indemne. Et il se dirigea vers la porte, un peu désorienté, un peu troublé, avec une seule idée en tête : retrouver Ian, et oublier l’horrible tentation que l’on mettait sur sa route, avec la promesse de le punir s’il y cédait. Mais alors qu'il franchissait le seuil, un détail attira son regard et il s'interrompit pour se pencher et le ramasser. Un petit bouquet de fleurs sauvages, abandonné là alors qu'il n'y était pas l'instant d'avant. Mr. H. fronça les sourcils, légèrement. Comment était-il arrivé là ? Qui l'avait déposé ici ? Serrant les tiges dans sa main, il resta quelques secondes immobile. Comment aurait-il pu se douter que le Destin lui avait déjà joué le mauvais tour qu'il redoutait tant ?
|
|
|
|
Contenu sponsorisé
|
Sujet: Re: Bitter sweet memories [Christian] |
|
|
|
|
|
|
|
Bitter sweet memories [Christian] |
|
|
Page 1 sur 1 |
|
|
Permission de ce forum: |
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
|
|
|
|
|
|